Alternance, voilà un mot sinon un terme qui est prononcé à répétition et chanté comme un refrain par les Togolais avant la tombée de la nuit et avec des interprétations aussi diverses que plurielles, complexes qu’alambiquées semant la confusion, toute une confusion dans les esprits.
Alternance, maître-mot de l’opposition togolaise : « Nous voulons l’Alternance, nous voulons du changement ». Voilà ce qui est dit. Alternance égal Changement.
Et comme il ne fallait pas mieux dire, Madame Kissem Tchangai-Walla, alors vice-présidente de la Commission vérité, justice et réconciliation (Cvjr) a sauté sur l’occasion pour bien confirmer que l’alternance s’est déjà réalisée, plusieurs fois d’ailleurs au Togo : « …Vous parlez de l’alternance, vous parlez du changement, eh bien il y a alternance, il y a changement puisque nombre de présidents (de la République) se sont succédés (ndlr) ». Cette déclaration, c’était peu avant le démarrage des audiences et devant un parterre de journalistes rassemblés pour être mieux outillés sur les travaux de la commission. Des propos qui avaient été diversément appréciés par beaucoup de journalistes. Mais dame Tchangai-Walla n’a-t-elle peut-être pas raison ?
Non! croit dire le confrère Jean-Baptiste Attisso : « Nous parlons de l’Alternance humaine ». Cette sortie du confrère à la conférence de presse de fin de mission de la Cvjr, a permis de redonner quelques sourires à Monseigneur Barrigah puisque la situation ne s’y prête pas vraiment. « Je ne savais pas qu’il y a aussi alternance humaine », dit le président de la Cvjr dans son sourire en coin.
L’« alternance humaine » du confrère peut paraître une nouvelle expression pour certains et même pour plusieurs, d’ailleurs tout semble aussi nouveau pour l’évêque-diplomate Barrigah.
Mais à y voir de près, cette alternance dont le confrère veut qu’il soit réalisé entre les personnes, plutôt cernée autour de la notion de changements, de successions entre individus qui ne seront pas des produits moulés dans un seul et même système, ou fruits du même clan ou du même courant de pensées, cette « Alternance humaine », dis-je, n’est aussi qu’une autre définition-dérivée du terme à l’instar de toute la panoplie que nous avons au Togo qui circule le long des routes.
Là où le confrère Jean-Baptiste aurait tort, c’est quand l’ex-fils du maître, Pascal Bodjona fait ce jeu de mots : « Il y a changement dans la continuité » et le grand maître même de dire : « Lui, c’est lui, moi, c’est moi ». Alors, faisons ce petit exercice superfétatoire mais important avec cette dernière déclaration en corrélation bien sûr avec la première. S’il y a un lui qui est lui et un moi qui est moi, alors lui et moi sont deux individus sans qu’ils ne soient opposés dans leurs visions sont quand même deux hommes différents. L’esprit des textes. Autrement dit, il s’est déjà réalisé une alternance humaine ou changement d’un « Lui » avec un « Moi » qui veut continuer dans la vision du « Lui » tout en étant singulier « moi, c’est moi ».
Les contestataires du régime tous les samedis à la plage « Place du changement » pour battre en brèche la forme d’alternance précitée, diront que l’alternance dont ils faisaient allusion, c’est que le Rpt quitte le pouvoir. Eh bien, maintenant le Rpt est parti, place à Unir. Non, c’est le même système, Rpt-Unir. On a seulement déshabillé Pierre pour habiller Paul…
Tellement ce mot Alternance-changement cristallise les passions, devient une obsession, et perdre beaucoup d’énergies si bien que l’on en oublie l’essentiel, c’est-a-dire ce qui viendrait après l’Alternance. Et cela, au temps T, personne n’est capable de le dire au peuple togolais. L’opposition togolaise qui en fait de ce mot une véritable chasse gardée au point de se tirer entre elle-même des balles dans les pieds, ne nous a jamais dit avec précisions, ce qu’elle fera des milliards engrangés chaque jour par le Port autonome de Lomé et les centres de perceptions d’impôts pour le bien être social des Togolais. Elle ne nous a jamais dit comment elle compte gérer les centaines de millions des phosphates, les revenus des « traces d’or » (pour reprendre le terme de Noupokou Danmipi) découverts il n’y a pas longtemps mais qui de toute vraisemblance se commercialisait depuis fort longtemps de manière « artisanale » et…et j’en passe.
Pis, ceux qui sont encore en exercice, au pouvoir, ne font pas l’effort nécessaire en matière de bonne gouvernance.
Et ce peuple naïf, non c’est grave, ce naïf peuple criera encore lors des élections contre quelques miettes : « Faure-vi vodoua, Détiaa kpoéléyi, Jean-pi gankpé…», comme si leurs misères et famines disparaissent par enchantement lors des élections et ne réapparaissent qu’après.
Cette attitude a par le passé vexé le président du Prr, Nicols Lawson qui se demandait si « Détiaa est un programme ou projet de société ». L’homme n’avait-il pas raison si lui au moins donne des chiffres et fait des propositions ou des projections financières ? Même si l’on doit penser que le président du Prr a l’art de l’irréalisme, on peut lui accorder le bénéfice du doute.
Après 50 ans d’errance politique du parti au pouvoir, 50 ans d’erreurs politiques des partis de l’opposition, il y a 50 bonnes années que l’on a de la peine à comprendre les profondes aspirations du peuple togolais.
Exemple type : « Il y a encore quelques jours, le peuple togolais dans la diversité du nord au sud, de l’ouest à l’est, qu’ils soient les étudiants de Kara, de Lomé, les membres du Syndicat des travailleurs du Togo, criait son ras-le-bol du régime Faure Gnassingbé et jurait de le bouter dehors comme un virus, une pathologie endémique. Maintenant que l’occasion est offerte à ce même peuple de procéder à un vote-sanction lors des législatives pour montrer au régime qu’il en a vraiment marre, il lui a plutôt donné carte blanche. Certains diront facilement c’est parce que le régime a fraudé lors des élections. D’accord. Mais demandez-vous aussi ceux qui votent encore ce régime qu’ils jugent les avoir maintenus pendant plus de quarante ans dans la famine, la misère et la servitude ne sont pas eux tombés sur la tête. Qui aurait cru qu’à Dapaong, après que Douti et Anselme soient tombés sous les balles de ce régime, l’Unir fait encore le plein. Encore des fraudes dira-t-on, n’est-ce pas ? Mais certains ont bel et bien voté Unir contre un sac de riz et peut-être un 50 mille francs. Croyez-vous qu’aucun enseignement de Dapaong n’a voté Unir alors que c’est tous les enseignements qui se sont levés il y a quelques jours pour demander en vain une augmentation de la grille salariale ? Aujourd’hui, les élections sont finies et le peuple intelligent reprend ses gangs contre le régime ». Comme quoi, l’homme est une mer dont on ne peut sonder les abysses. (Cette dernière partie est en guillemets parce que je l’ai empruntée d’une de mes récentes analyses et l’actualiser ».

Alternance ? En fait de quoi je me mêle !

Voltic Togo