Idrissou Akibou, directeur de la prison civile de Lomé

Les prisons civiles constituent de véritables bombes à retardement dans la propagation de la pandémie du nouveau coronavirus, Covid-19. Le Togo ne semble pas y échapper avec des cas décelés positifs et un décès. Des mesures sont prises mais, cela rassure-t-il autant ?

A la prison civile de Lomé, 19 cas sont détectés positifs à la Covid-19 dont 1 décès. La situation a donné lieu à des mouvements d’humeur dans le centre pénitencier, les autres disant craindre une contamination. Mais, le Directeur général de l’administration pénitentiaire, Idrissou Akibou rassure rassure : « ces 19 cas font partie des nouveaux prisonniers mis en isolement ». Une mesure que le patron de la prison civile de Lomé, avait annoncé pour éviter une contamination de masse. Mais l’inquiétude semble persister.

Situation au Togo

En Afrique, mieux au Togo, les prisons civiles sont connues pour une surpopulation carcérale.

Un rapport publié le 11 mars 2020 par le département d’Etat américain dresse une situation peu reluisante des prisons au Togo.  Le rapport précise qu’à la date du 28 août 2019, il y avait 5 277 détenus condamnés et prévenus dont 158 ​​femmes dans les 13 prisons au Togo. Et pourtant, ces prisons  sont conçues pour contenir 2 720 détenus. Le même rapport relève que la prison de Tsévie située à environ 35 km de la capital, avait une contenance supérieure de 570% à sa capacité d’accueil, avec 319 détenus. La prison  était conçue pour en accueillir 56.

Il est clair que la surpopulation carcérale n’est plus à démontrer au Togo. Le Secrétaire général de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), Gerald Staberock, a qualifié d’affreuses les conditions de détention dans les prisons civiles au Togo. Cela a poussé Genève, en août 2019, à réclamer la fermeture de la prison civile de Lomé. Quelques jours plus tard, Lomé annonce que de nouvelles prisons sont en chantier.

Quel rapport avec la Covid-19?

L’Organisation mondiale de la santé (OMS), sur son site web, donne des détails sur la covid-19. Dans les précautions à prendre, cette organisation qui travaille avec un réseau mondial de praticiens de la santé précise qu’il est important de se tenir à un mètre au moins des autres personnes. Or, les prisons civiles sont championnes en promiscuité.

Le 9 avril 2020 le gouvernement a annoncé l’arrêt des visites aux détenus dans toutes les prisons civiles de Lomé. Et ce, jusqu’à nouvel ordre. Les repas des prisonniers ont doublé, grâce à un appui de l’Union européenne.

Au niveau mondial, le Fonds des nations unies pour l’enfance (UNICEF) a appelé à  libérer les enfants en détention. Le 25 mars 2020, la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Michelle Bachelet, a appelé les gouvernements à prendre des mesures d’urgence afin de protéger la santé et la sécurité des personnes en détention et dans d’autres centres fermés. Au Togo, par décret portant mesure de grâce présidentielle,  1048 prisonniers de toutes les prisons civiles du Togo, dont 458 pour Lomé, ont été libérés.

Le Cacit demande encore plus

Le Collectif des associations contre l’impunité au Togo (CACIT) travaille sur les questions carcérales. Pour le directeur exécutif, Ghislain Koffi Nyaku, la nécessité de désengorger la prison civile de Lomé est très important aujourd’hui.

« Il faut exploiter la piste de libérer les personnes qui ont été arrêtés dans le cadre des manifestations, pour avoir fait des protestations liées à la politique », a-t-il confié et d’ajouter « Il y aussi lieu de libérer les prévenus car c’est à cause de cette situation, en partie, que les prisons sont surpeuplées ».

A en croire M. Nyaku, le Togo tout comme d’autres pays, est dans une urgence sanitaire et doit commencer par repenser la politique carcérale. »L’arrivée de la Covid-19 a encore en lumière les failles du système carcéral au Togo », a confié M.Nyaku.

Au Togo comme dans beaucoup de pays au monde, les prisons civiles tout comme les maisons d’arrêt constituent une bombe à retardement en cette période de crise sanitaire liée à la Covid-19.

Voltic Togo