Le taux de bancarisation de la zone UEMOA comme au Togo est très faible. A peine 20% selon plusieurs rapports. Le Togo n’étant pas épargné, l’économiste Nadim Michel Khalife soutient qu’il faut résoudre deux facteurs essentiels notamment le secteur informel et la justice pour espérer grimper les marches.

Pour le professeur d’Université Nadim Michel Khalife, le taux de bancarisation faible du Togo est en partie dû à plusieurs facteurs dont les plus importants sont le secteur informel et la justice. Il résume la bancarisation à la facilité d’accès aux services bancaires surtout les prêts. Or, il est aujourd’hui non seulement délicat pour ces entrepreneurs dans le secteur informel d’y accéder même si selon lui, ce secteur envahi par des gens véreux.

Traditionnellement au Togo, dit-il, le secteur informel était réservé aux gens non instruits ou qui ne pouvaient pas tenir une comptabilité. Mais, depuis une dizaine d’années, le secteur est devenu trop important à cause de la fraude fiscale et douanière. Auparavant, les contrôles fiscaux n’allaient pas dans le secteur informel et les gens s’en sont servis pour ne pas payer de TVA. Dans ce cas, l’argent du secteur informel ne passe pas nécessairement par la banque. Certains préfèrent garder leur économie chez eux à la maison dans leur coffre-fort et faire toutes leurs opérations en espèces. A ce rythme, la bancarisation subit un coup. « Quand une économie a un secteur informel très puissant, le taux de bancarisation ne peut être que faible », soutient-il avant d’ajouter « il faudrait que le climat des affaires soit sain ».

L’avis est plus ou moins partagé chez l’économiste Blaise Amoussou-Kpeto qui martèle que les banques ne font pas assez d’efforts pour se rapprocher des populations et il y a une autre partie de la population qui a peur de rentrer dans les banques. « Vous comprenez que les services commerciaux ne font pas suffisamment pour vulgariser la banque et faire entrer les populations toutes les classes. On recherche plutôt des cadres au grand dam des ouvriers », a ajouté l’économiste.

Monsieur Khalife argue que l’une des grandes erreurs commises par le Togo pour avoir un taux faible de bancarisation est de n’avoir pas opté pour la création de banque pour les PME. Dans les PME, précise-t-il,  on y retrouve des jeunes dynamiques qui ont un bagage de formation mais n’ont pas de moyens pour réaliser leurs projets. Il faut une banque qui les accompagne dans leurs affaires et contrôler dans leurs opérations,

« Une fois une banque des PME installé avec un capital de 10 milliards au moins, pour accorder de petits prêts, cela va créer une nouvelle dynamique, un changement de mentalité et de facto décourager cette ruée effrénée de la jeunesse vers la capitale à la recherche de la pitance journalière alors qu’ils pouvaient investir dans l’agriculture », explique-t-il. « Les PME, c’est l’âme d’une nation, la matière vivante ».

D’autres parts, il relève que pour que les banques acceptent faire ces prêts à sa clientèle, il faut une justice en laquelle avoir une confiance. « Malheureusement, le problème de la justice au Togo est très grave et profond », fait-il observer et d’ajouter « Les commerçants, les banques et les institutions de crédit ne peuvent pas gagner en justice même s’ils ont raison. La justice n’est pas égale pour tous, il y a énormément de distorsions. C’est ce pourquoi il n’y a pas beaucoup d’investisseurs sérieux qui viennent au Togo. Ça porte un coup à la bancarisation ».

Pour cet homme d’économie, plus il y a une justice équitable, la confiance d’accorder des crédits est instaurée, les gens peuvent prétendre avoir des découverts en banque pour faire des investissements.

La lutte contre la corruption et le traitement des opérateurs tout comme entrepreneurs avec impartialité devra permettre, en partie de faire grimper le taux de bancarisation. « La faveur accordée à certains opérateurs en matière d’exonération fiscale et paiement de TVA tue l’économie et du coup, la bancarisation », fait noter Nadim Michel Khalife.

Voltic Togo