Le monde réduit peu à peu le nombre d’enfants travailleurs, mais en Afrique subsaharienne, le fléau résiste. Près de 87 millions d’enfants y sont encore astreints au travail, selon le dernier rapport conjoint de l’Organisation internationale du travail (OIT) et du fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF).

Alors que le nombre d’enfants astreints au travail est passé de 246 millions en 2000 à 138 millions en 2024, soit une réduction de près de 50 %, l’Afrique subsaharienne reste le principal foyer mondial du travail des enfants, selon un nouveau rapport publié le mercredi 11 juin 2025 par ces deux institutions.

En 2024, près de 54 millions d’enfants dans le monde effectuaient des travaux dangereux, compromettant leur santé, leur sécurité et leur développement. Et malgré les efforts globaux, l’Afrique subsaharienne concentre à elle seule près des deux tiers de tous les cas enregistrés. « Pire : le nombre d’enfants concernés n’a pas baissé dans la région, malgré un léger recul du taux de prévalence, passé de 24 % à 22 %. Une stagnation alarmante, due à une combinaison de croissance démographique, de conflits persistants, de pauvreté extrême et de fragilité des systèmes de protection sociale », a déploré ces institutions.

« La place des enfants est à l’école, pas dans les champs ni dans les mines », a insisté Gilbert Houngbo, directeur général de l’OIT. Il appelle à soutenir les familles avec des emplois décents et une protection sociale renforcée pour éviter qu’elles ne soient contraintes de faire travailler leurs enfants.

L’agriculture, principal secteur concerné

Le secteur agricole représente à lui seul 61 % du travail des enfants dans le monde, loin devant les services 27 % et l’industrie 13 %. Dans de nombreux pays africains, les enfants contribuent aux activités familiales dans les zones rurales, souvent sans accès à une éducation de qualité.

Les filles, quant à elles, sont particulièrement touchées par les tâches domestiques non rémunérées, souvent invisibles dans les statistiques, mais tout aussi pesantes. « Lorsque l’on prend en compte les travaux ménagers de plus de 21 heures par semaine, l’écart de genre s’inverse, les filles étant plus exposées que les garçons », a-t-il souligné, le communiqué.

Une alerte contre les reculs budgétaires

Malgré les avancées globales, notamment en Asie et en Amérique latine, les auteurs du rapport préviennent que les coupes budgétaires mondiales dans les secteurs sociaux risquent de ruiner les efforts entrepris. La baisse des investissements dans l’éducation, la protection sociale et la collecte de données affaiblit la lutte contre cette pratique.

« Des millions d’enfants travaillent encore dans des conditions dangereuses simplement pour survivre », alerte Catherine Russell, directrice générale de l’UNICEF, soulignant l’urgence de renforcer l’accès à l’éducation et aux services sociaux.

Des mesures urgentes pour inverser la tendance

L’OIT et l’UNICEF appellent à accélérer les investissements dans les domaines tels que la protection sociale des familles vulnérables (comme les allocations pour enfants) ; les systèmes de protection de l’enfance ; l’éducation gratuite et accessible, notamment dans les zones rurales ; le travail décent pour les adultes ; et l’application rigoureuse des lois contre l’exploitation des enfants dans les chaînes d’approvisionnement.

Le rapport conclut que pour éliminer le travail des enfants d’ici 2030, il faudra aller 11 fois plus vite qu’actuellement. Un défi immense, surtout pour les pays africains, où le poids des inégalités structurelles continue de faire obstacle au droit fondamental des enfants à une enfance protégée.

Voltic Togo