Le parti au pouvoir depuis vingt ans en Afrique du Sud estime jeudi avoir largement remporté le scrutin législatif, même s’il cède un peu de terrain par rapport au dernier scrutin de 2009.
Selon des résultats partiels portant sur plus de 60% des bureaux de vote à 14h (13h au Luxembourg), le parti de feu Nelson Mandela menait jeudi avec 63,3% des voix, contre 66,9% cinq ans plus tôt. «Bien que des tendances commencent à se dégager, il est encore beaucoup trop tôt pour prévoir de façon censée le résultat final», a prévenu la présidente de la Commission électorale indépendante, Pansy Tlakula, notant qu’on attendait encore les résultats des grandes villes, dont Johannesburg. Un tel score de l’ANC est toutefois conforme aux prévisions des sondages. «Avec un score de plus de 60%, ça sera une victoire décisive», a indiqué à l’AFP Jessie Duarte, secrétaire générale adjointe de l’ANC. «Si l’on regarde les tendances mondiales, il faut s’attendre à ce qu’un parti au pouvoir ne garde pas éternellement des scores aussi hauts», dit-elle pour justifier le relatif recul du parti.
«Nous avons confiance, nous allons avoir un mandat accordé à une écrasante majorité par notre peuple pour continuer de diriger ce pays et faire aller l’Afrique du Sud de l’avant», a affirmé Jackson Mthembu, le porte-parole du mouvement. Même si les résultats sont encore loin d’être définitifs, l’ANC est assuré de gérer le pays pour le cinquième quinquennat consécutif. Et le président sortant Jacob Zuma sera réélu par le 21 mai par une Assemblée nationale où il aura toujours une claire majorité.
La province du Cap, la seule que l’ANC ne contrôle pas
Les Sud-Africains se sont massivement déplacés mercredi pour participer à ces cinquièmes élections législatives depuis la chute de l’apartheid en 1994. La participation était estimée à environ 72,6%. Derrière l’ANC, le principal parti d’opposition, l’Alliance Démocratique (DA), semblait réussir son pari de progresser encore pour passer la barre des 20%. Les résultats lui donnaient jeudi après-matin 22,2% des voix, contre 16,7% en 2009. «Je crois que nous ferons environ 23%, a indiqué à l’AFP sa dirigeante Helen Zille. Bien sûr, nous espérions mieux, mais nous avons fait ce que nous pouvions.» «La DA va clairement de l’avant», a relevé la chef de son groupe parlementaire Lindiwe Mazibuko, oubliant que le parti espérait atteindre 30% il y a encore quelques mois.
Mme Zille devrait rester Premier ministre du Cap occidental, la prospère province du sud-ouest, la seule sur les neuf du pays que ne contrôle pas l’ANC. «J’espère que nous ferons 58% dans cette région», a-t-elle dit. Les résultats provisoires lui donnaient 59,9%. Le parti radical populiste de Julius Malema, les Combattants pour la liberté économique (EFF), était en troisième position au niveau national avec 4,9%.
Un militant de l’ANC abattu devant un bureau de vote
Parmi les grands perdants du scrutin, Cope, un parti issu d’une scission de l’ANC qui avait remporté 7,4% des voix en 2009, et n’en aurait plus que 0,7%. Et surtout, l’intellectuelle Mamphela Ramphele, qui avait voulu incarner une alternative libérale noire à l’ANC, dépasserait à peine les 0,2%. Accusé de corruption et d’incompétence par l’opposition, l’ANC reste le parti de cour de millions de Sud-Africains, qui estiment que c’est à la formation qu’a incarné Nelson Mandela qu’ils doivent leur liberté. Mais les violences urbaines quasi-quotidiennes dans le pays prouvent que le parti au pouvoir ne bénéficie plus depuis longtemps d’aucun état de grâce. Les quartiers les plus pauvres s’enflamment régulièrement, généralement pour réclamer un accès à l’eau ou à l’électricité, dénoncer l’incurie des élus locaux ou réclamer des emplois.
Le prochain gouvernement devra d’urgence créer des emplois, alors que le taux de chômage dépasse officiellement les 25% (plus de 28% pour la majorité noire), sans compter les millions de personnes découragées, qui ont quitté le marché du travail. La journée de vote s’est globalement déroulée dans le calme. Un militant de l’ANC a toutefois été abattu devant un bureau de vote à kwaDukuza (est), dans la province du KwaZulu-Natal où les règlements de compte politiques font de nombreuses victimes chaque année. Une autre personne a été blessée dans un township de Durban.
Source: L’Essentiel