Depuis Mai 2013, le désormais ex-commandant Olivier Poko Amah a été jeté derrière les barreaux et conduit à la prison de Mango. Il ne sera relaxé que le 14 février 2014, sous contrôle judiciaire, à la veille de la visite du Haut-Commissaire de Nations Unies aux droits de l’homme au Togo, comme annoncé par Africa Rendez-vous. Même s’il confie que  son vœu le plus cher est d’avoir une liberté « totale », le président de l’ASVITO a accepté parler à la rédaction d’Africa Rendez-vous, de ses conditions carcérales à Mango.

Africa Rendez-Vous : Vos premières impressions à chaud, c’est du regret ?

Je suis d’abord content de sortir mais j’ai toujours une pensée envers mes codétenus qui sont encore dans une situation de souffrance, et j’aimerais bien que Dieu leur fasse grâce pour qu’ils sortent de là. Je suis aussi content de la manière dont les populations ont réagi à ma sortie. Je profite de l’occasion pour remercier les Togolais et ceux de la diaspora qui ont eu une pensée envers moi et qui se sont aussi mis à l’œuvre. J’ai eu la conviction que tous les messages que j’étais en train de véhiculer, beaucoup de Togolais l’ont bien compris et adopté. Je les remercie. Je pense que je n’ai rien dis de grave et mes avocats ont fait leur travail.

Près de neuf (9) mois de privation de liberté, ça ne doit pas être facile.

Pas facile ! Vous savez, j’étais loin de Lomé, loin de ma famille. Nous nous sommes mis dans les mains de Dieu. Il nous a protégés et assistés. Aujourd’hui nous sommes libres et nous remercions le Créateur.

Les conditions carcérales sont très dures. La surpopulation carcérale est toujours là. Beaucoup de prisonniers étaient très contents du rapport du HCDH (Haut-commissariat aux droits de l’homme) et ont espoir qu’ils seront délivrés un jour. C’est les lacunes terribles de notre justice qui font que la surpopulation carcérale est une réalité. On ne doit pas passer sous silence la nourriture des prisonniers qui est lamentable. Entre temps, le ministre avait promis aux membres du comité contre la torture à Genève qu’à partir du 1er Janvier 2013, les prisonniers auront deux repas par jour mais jusqu’aujourd’hui ce n’est pas fait. Quand un prisonnier n’a pas un parent à ses chevets, sincèrement, il est mal nourrit, il est malade et en meurt. Il faut arrêter l’hécatombe dans nos prisons.

Manfred Novak a qualifié la prison dans notre pays de tragédie. Moi je dirai que c’est un crime contre l’humanité. Il faut que les autorités togolaises se réveillent pour changer la situation en adoptant de nouveaux codes de procédures pénales et un nouveau code pénal et permettre de décongestionner les prisons au profit des Togolais.

Et vous, les vôtres ont-elles été particulières ?

Elles n’ont pas été particulières que ça. La remarque est qu’il y avait un peu de respect pour moi. Tout le monde savait que je milite pour les droits de l’homme et il y a eu une attention particulière envers moi. Je dirai qu’à Mango, les choses qui se pratiquaient avant moi ont cessé immédiatement.

Comme quoi par exemple ?

A Mango, certains sont en prison, dans la prison. Quand les associations de défense des droits de l’homme m’avaient rendu visite, c’est la première des choses que j’ai dénoncé. On arrête des gens, on les enferme pendant deux (2) semaines avant qu’ils n’aient accès à la cour. Même, avant d’avoir accès à la cour, il faut payer 5000 F CFA (environ 8€). Les prisonniers m’ont fait cette confidence ajoutant que s’ils ne paient pas le montant demandé, ils sont mis en isolement pendant deux (2) semaines voire un (1) mois. Quand je suis arrivé en Mai, il y avait trois (3) jeunes qui étaient en isolement depuis décembre 2012 et c’est à mon arrivée, quelques jours seulement après qu’ils ont eu droit à la cour. Je martèle que la situation dans les prisons est inquiétante. J’espère que les choses vont évoluer avec l’arrivée de nouveaux surveillants de l’administration pénitentiaire. Mêmes les cellules ne sont pas éclairées. Il y a eu des lobbyings mais à ce jour, rien n’est fait.  Seule ma cellule était éclairée quand j’y étais. Il faut améliorer les conditions carcérales car tout homme est un prisonnier en sursis.

Olivier Amah avant, et maintenant… doit-on s’attendre à un changement ?

Je suis encore plus déterminé pour défendre les Togolais et les droits de l’homme dans mon pays.

Interview réalisée par Sylvio Combey

Voltic Togo