Le gouvernement du Soudan du Sud et les rebelles qui s’affrontent depuis la mi-décembre ont signé jeudi soir un accord de cessez-le-feu, une première étape pour tenter de mettre fin à un conflit qui a déjà fait des milliers de morts et des centaines de milliers de déplacés.
Le président américain Barack Obama a salué la signature de ce cessez-le-feu, le qualifiant de «première étape cruciale» dans un règlement de la crise meurtrière dans ce pays créé en 2011.
«Je salue la signature aujourd’hui d’un accord qui met fin aux hostilités au Soudan du Sud qui constitue une première étape dans la construction d’une paix durable», a déclaré le président dans un communiqué.
Le cessez-le-feu devra être appliqué sous 24 heures.
Les délégations du gouvernement du Soudan du Sud et de la rébellion menée par l’ex-vice président Riek Machar ont paraphé le texte en présence de médiateurs étrangers et de journalistes à Addis Abeba. Ils négociaient laborieusement depuis trois semaines dans la capitale éthiopienne, sous l’égide de l’organisation est-africaine Igad.
Les deux parties ont également signé un accord prévoyant la libération de onze détenus proches de Riek Machar, arrêtés au début des combats qui ont éclaté entre unités rivales de l’armée à Juba le 15 décembre. La question de cette libération était au coeur des laborieux pourparlers entamés début janvier.
Aucune date n’a cependant été donnée pour cette libération.
«Ces deux accords sont les ingrédients pour créer un environnement propice à une paix totale dans mon pays», a déclaré au cours de la cérémonie de signature le négociateur en chef des rebelles, Taban Deng.
«Nous espérons pouvoir atteindre rapidement un accord (plus global) qui mettra un terme au bain de sang», a de son côté lancé le négociateur en chef du gouvernement, Nhial Deng Nhial.
Le Soudan du Sud est ravagé depuis le 15 décembre par des combats entre les forces sud-soudanaises loyales au président Salva Kiir et la rébellion regroupée derrière Riek Machar.
Salva Kiir accuse Riek Machar, limogé en juillet dernier, et ses alliés de tentative de coup d’Etat. Ce dernier nie, et reproche au premier de ne chercher qu’un prétexte pour se débarrasser de ses opposants au sein du régime, issu de la rébellion sudiste qui a combattu Khartoum pendant la longue guerre civile (1983-2005) ayant débouché sur l’indépendance du Soudan du Sud en juillet 2011.
Capitales régionales reprises par l’armée
Les combats, qui au fil des semaines se sont propagés à la majeure partie du territoire, ont fait des milliers de morts et chassé de chez eux plus d’un demi-million de personnes. Certains analystes avancent un bilan possible de 10.000 morts.
ONU et ONG ont fait état d’atrocités de la part des deux camps – exécutions sommaires, viols, enrôlement d’enfants-soldats notamment – et de massacres à caractère ethnique. A la rivalité politique entre MM. Kiir et Machar, se greffent des profonds et anciens antagonismes entre les peuples dinka et nuer dont sont respectivement issus les deux hommes.
Jeudi, l’ONG NRC (Norwegian Refugee Council), a comparé les atrocités commises au Soudan à celles ayant court en Syrie ou en Somalie.
«Il y a de plus en plus de meurtres ethniques et les deux principales tribus du Soudan du Sud semblent être impliquées», a déclaré jeudi matin à l’AFP son secrétaire général Jan Egeland, ancien responsable de l’action humanitaire de l’ONU.
«Cela a commencé par une lutte politique entre des hommes qui auraient pu régler ça dans un processus de négociation politique (…). Maintenant, des femmes et des enfants meurent simplement parce que ces hommes ne veulent pas s’asseoir et discuter», a-t-il poursuivi.
Ces derniers jours, l’armée sud-soudanaise a repris le contrôle de toutes les capitales régionales tombées aux mains des partisans de M. Machar, notamment Bor, capitale de l’Etat oriental du Jonglei, le plus étendu du pays, le 18 janvier, et Malakal, capitale de l’Etat pétrolier du Haut-Nil, le 20.
Les forces fidèles à M. Machar semblaient néanmoins contrôler toujours de vastes zones rurales dans plusieurs régions.
L’ONU a indiqué mercredi soir que l’armée sud-soudanaise avait entrepris de fouiller Malakal maison par maison, ajoutant héberger désormais 72.000 personnes dans ses huit bases du pays.
La signature des deux accords jeudi a été salué par les diplomates étrangers, notamment le médiateur en chef pour l’Igad, Seyoum Mesfin, qui s’est félicité qu’un premier round de négociations ait été conclu. Mais dans l’esprit de tous, il est clair que ces deux points ne suffiront pas à effacer des semaines de sanglants conflits, alimentés par de vielles rivalités.
«Nous devrons bientôt continuer avec un dialogue politique et travailler à une réconciliation nationale», a ainsi ajouté le médiateur de l’Igad.
Les Etats-Unis, parrains de l’indépendance du Soudan du Sud, ont également salué ce cessez-le-feu, le qualifiant de «première étape cruciale».