L’Afrique juge l’Afrique, c’est la formule agitée bruyamment depuis l’année dernière par les promoteurs et soutiens des Chambres africaines Extraordinaires dans le cadre du procès de l’ancien Président Tchadien Hissene Habré. Depuis cette année, celui que l’opinion publique africaine et tchadienne désigne comme un dictateur ou un bourreau a été condamné à Dakar à la prison à vie. Il s’agirait d’une victoire pour les familles des familles de victimes mais plus encore d’une évolution de la justice pénale internationale.

Pour la 1ère fois dans l’histoire politique du continent noir, un ancien Chef d’État a été reconnu coupable de crime et condamné par des juges africains. Cette évolution était la réponse d’une partie des leaders politiques africains aux controverses que suscitent les présences des anciens dirigeants politiques ou militaires africains dans les geôles de la Cour Pénale Internationale. La Cour Pénale Internationale est visiblement créée pour juger les seuls dirigeants africains martèlent les Africains opposés au fonctionnement de l’entité issue du Traité de Rome signé par de nombreux États Africains.

Depuis ce mardi, le Président Burundais apporte une nouvelle position dans son opposition à la CPI. Pierre Nkuruziza a promulgué le texte voté par le parlement de Bujumbura en faveur d’un retrait du Burundi de la Cour Pénale Internationale. Il s’agit sans aucun doute d’un pas franchi par un État africain alors même une sortie en bloc de la CPI peine à se matérialiser.

En réalité, cette sortie annoncée du Burundi ne peut qu’être comprise comme un véritable pas fait en arrière au moment où les défenseurs des droits de l’homme sur le continent n’ont pas fini de définir la parade incontestable ou une réponse sans ambigüité aux velléités guerrières et autocratiques de certains leaders politiques africains. Quelle va être la réponse de l’Union Africaine, soutien des Chambres Africaines Extraordinaire de Dakar et soucieuse de lutter contre l’impunité sur le continent comme prétend le faire la CPI ?

Engagé dans un vaste programme de démocratie et de respect des droits de l’homme, le continent analyse malheureusement de diverses manières les questions de l’impunité. Sinon comment comprendre l’attitude des autorités burundaises pointées du doigt par la communauté internationale suite aux violences liées à la volonté du Président de s’offrir un 3è mandat à la tête de son pays ? Le geste du Burundi va-t-il susciter une certaine adhésion dans certaines capitales africaines ?

En attendant toute autre réponse, il faut saluer la Cour Pénale Internationale qui s’est montrée ces dernières années comme une véritable épée de Damoclès suspendue au dessus des têtes des leaders politiques et Chefs militaires africains. Elle reste sans doute aux yeux de nombreux Africains un recours important. C’est pourquoi, la communauté africaine doit œuvrer plus que jamais à la promotion des valeurs qui fondent les sociétés démocratiques, citées en exemple au quatre coins du monde. Le Burundi ouvre une voie probablement sans issue. Bujumbura apportera-t-il au final son soutien à toute autre initiative faisant la promotion de la justice et fermée à l’impunité ? Ou au contraire le pays va-t-il demeurer dans la singularité ? La grande histoire jugera…

Voltic Togo