kondjigbalè

« Kondjigbalè », “carnet de santé “ en langue locale Ewé, est un carnet numérique. Il épargne aux patients de trimbaler de la paperasse et d’aller attendre un médecin dans une queue interminable. Une plateforme digitale développée depuis 2019 par trois jeunes togolais, essaie depuis lors, de rapprocher les populations des hôpitaux.

En quatre ans, « Kondjigbalè » a apporté sa contribution au processus de modernisation de la médecine au Togo.  Elle permet aux patients aussi d’accéder facilement à leurs informations médicales, de recevoir des soins personnalisés et de bénéficier d’un suivi attentif. Et dans l’autre sens, elle offre aux médecins, les outils nécessaires pour prodiguer des soins, poser des diagnostics précis et intervenir rapidement.

« Nous avons constaté que dans les cliniques et hôpitaux, les patients malgré qu’ils ne se sentent pas bien, doivent faire la queue avant de trouver un médecin. Pour réduire ce temps d’attente, le patient peut prendre rendez-vous depuis la maison, et une fois arrivé à l’hôpital, il est consulté par le médecin à l’heure convenu », explique Amen Galley, chef marketing et co-fondateur de kondjigbalè.

Les carnets de santé physique s’usent et se perdent assez facilement. Les affectations, déménagements et autres obligations professionnelles amènent les patients à changer de centre de santé. La conséquence est qu’à chaque déplacement il faut acheter le carnet de santé du centre de traitement. L’une des conséquences directes est que le nouveau médecin perd l’historique de traitement. La plateforme numérique a réussi à faire tomber ces tracasseries. « Grâce à kondjigbalè, le médecin peut suivre de façon fiable le traitement au patient et poser le diagnostic approprié. Il sait quelle analyse ou quel médicament prescrire et a une bonne lecture des antécédents médicaux, » a précisé M. Galley et d’ajouter « Cela évite de prendre peut-être 10 minutes pour trouver le groupe sanguin d’un patient, alors que 10 minutes dans le domaine de la santé est capital ».

Cette plateforme permet vraiment de rapprocher les hôpitaux des patients et aide les médecins à avoir une vue globale sur les urgences. Par exemple dans la région des Savanes d’une population de plus de 1 million d’habitants, selon des données de l’institut national de la statistique et des études économiques et démographiques (INSEED), il y a un seul pédiatre pour tout ce monde. Donc il serait plus facile aux professionnels de santé de savoir quelles interventions il y a à faire et où. Il sait s’il y a un cas à évacuer ou à suivre vraiment de près.

Briser la fracture numérique

Plus les avancées technologiques s’opèrent, plus la fracture numérique devient encore grande. Ce fossé est de plus en plus remarqué dans les contrées reculées du pays où les communautés ont difficilement accès aux outils numériques. Les jeunes promoteurs de kondjigbalè y ont pensé. Au-delà de l’application mobile et du site internet,  Fabienne Minlekib, Yvon Koudam et Amen Galley travaillent actuellement à mettre en place des canaux alternatifs comme un centre d’appel, un Unstructured Supplementary Service Data (USSD), un système de notification par SMS et un chabot WhatsApp.

Selon les explications de Amen Galley, le centre d’appel c’est beaucoup plus pour les personnes qui n’ont pas accès à l’internet et qui n’ont pas vraiment fréquenté.  « Avec un numéro très court, vous tombez sur un assistant médical qui vous assiste et vous dit ce qu’il faut faire et peut vous orienter vers un médecin ou vous prescrit des soins. Il y a aussi le canal USSD, toujours pour les zones non connectées mais pour les personnes qui savent lire. Grâce à un numéro court, lancé sur n’importe quel réseau, ils reçoivent des directives à suivre au fur et à mesure jusqu’à satisfaction », détaille le responsable marketing de kondjigbalè.

Kondjigbale
Image: Kondjigbale

« Nous avons pensé aussi à tout ce qui est système de notification par SMS aussi. On fait des push SMS vocaux, les patients décrochent et écoutent le message sur les SMS. Nous sommes en train de travailler également sur un chabot WhatsApp avec lequel tout le monde à travers son WhatsApp peut interagir avec la plate-forme comme s’il avait téléchargé l’application mobile », a-t-il ajouté.

Atteindre pleinement les pharmacies

Après une consultation en ligne, avec kondjigbalè le médecin fait un compte-rendu depuis l’interface de l’application et de là, prescrire des médicaments et donc une ordonnance numérique. Pour les premiers responsables de kondjigbalè, le soulagement de la pénibilité d’accès aux soins ne devrait pas s’arrêter juste aux quatre murs des cliniques. Ils veulent suivre la chaîne jusque dans les pharmacies afin d’aider les médecins à délivrer des ordonnances numériques. « Nous sommes en train de travailler avec les pharmacies de sorte qu’avec cette ordonnance, vous n’ayez plus à vous déplacer en pharmacie pour l’achat. Vous pouvez envoyer votre ordonnance électroniquement, et vous faire livrer directement à domicile », explique M. Galley.

Ce travail de démocratisation des services de santé n’est pas sans difficulté. Même après la certification obtenue de Cyber défense Afrique (CDA) et qui les place comme 2ème application la plus sécurisée au Togo et la 3ème dans la sous-région kondjigbalè rencontre des réticences auprès de certains consommateurs pour se l’approprier. Même de grands pharmaciens qui n’ont pas eu la culture du numérique hésitent encore à faire le pas. Kondjigbalè et ses plus de 1000 utilisateurs veulent arriver à faire sauter ces verrous. Déjà, les promoteurs se sont engagés à respecter les plus hautes normes scientifiques, éthiques et à promouvoir l’innovation médicale pour tous.

Amen Galley, chef marketing et co-fondateur de kondjigbalè

Zoom sur les trois mousquetaires

Fabienne Minlekib est le chef opération office et chargée de suivi de projet Kondjigbalè. Elle est chef de projet numérique, consultant et ingénieur logiciel. Yvon Koudam qui est le concepteur de la plateforme Kondjigbale, est un spécialiste de la transformation numérique, technologie de la santé, innovation, ingénieur logiciel, développement durable et de l’autonomisation des jeunes. Amen Galley, responsable marketing de la plateforme, est un spécialiste en transformation numérique des organisations, directeur commercial et chef de projet informatique.

Ce reportage à été produit dans le cadre de la bourse de journalisme sur les IPN organisée par la fondation des médias pour l’Afrique de l’ouest et Co-Develop.

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