Depuis la fin de l’année 2021, les régions septentrionales du Bénin et du Togo font l’objet d’attaques de plus en plus fréquentes et meurtrières. Elles sont attribuées à Jama’at Nusrat al-Islam wal-Muslimin (JNIM), un groupe armé lié à Al-Qaïda formé au Mali qui s’étend désormais aux régions septentrionales de plusieurs pays du golfe de Guinée. Et, des peuls encore appelés foulani sont de plus en plus dans le viseur des autorités béninoises et togolaises. Amnesty International parle de violation de droits humains. La lutte contre les groupes armés, précise AI, ne doit pas justifier ces violations.
Le Bénin a connu près d’une vingtaine d’attaques de groupes armés depuis la fin de l’année 2021 bien que les autorités n’aient communiqué que sur certaines d’entre elles. Le Togo quant à lui a subi au moins quatre attaques visant des membres des forces de défense et de sécurité et des civils depuis novembre 2021.
Dans une déclaration parvenue à Africa rendez-vous, Amnesty International rapporte que des personnes ont été arrêtées et détenues de manière arbitraire dans les deux pays, notamment en raison de leur appartenance communautaire.
« Les forces de sécurité commettent des violations des droits humains dans le cadre de la lutte contre les groupes armés au Bénin et au Togo, notamment contre les membres de l’ethnie peul. Le risque existe que les violations des droits humains deviennent systématiques et s’aggravent, comme c’est le cas dans les pays voisins qui combattent les mêmes groupes armés depuis plusieurs années. Les autorités béninoises et togolaises doivent maintenant mettre un terme à cette situation », a déclaré Samira Daoud, Directrice régionale d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre.
Arrestations et détentions arbitraires
Dans le nord-est du Bénin, le 19 mars 2022, un homme de 70 ans a été arrêté par la police dans la ville de Tanguiéta, dans le département de l’Atacora, à la frontière avec le Burkina-Faso. Il a été libéré près de deux semaines plus tard sans avoir été inculpé. Il a d’abord été emmené pour un voyage de plusieurs jours à 587 km de Tanguiéta à Cotonou, sur la côte sud, puis a été détenu pendant une semaine dans cette ville.
Amnesty International précise qu’il était venu à Tanguiéta pour emmener quelqu’un à l’hôpital. « Lorsqu’il a quitté l’hôpital, la police est apparue et lui a demandé s’il était peul. Il a répondu qu’il l’était, et il a été emmené avec plusieurs autres hommes arrêtés le même jour », rapport AI tout en gardant l’anonymat de la source.
« Pendant le trajet, les policiers les ont frappés dans le dos avec la crosse de leurs fusils. Ils ont conduit de nuit et sont restés en détention pendant la journée. L’un des policiers leur a dit que ce sont les Peuls qui tuent les policiers. »
Cette organisation internationale de promotion des droits de l’homme indique qu’au Togo, plusieurs dizaines de personnes ont été arrêtées arbitrairement le 16 mai 2022 dans la ville de Timbou, dans la région des Savanes, en raison de leur appartenance à l’ethnie peul, évoquant le témoignage de deux personnes interrogées. « Ils ont été détenus par les forces militaires de Timbou, Dapaong, Biankouri et Cinkassè sans avoir accès à un avocat, photographiés et libérés les 20 et 21 mai 2022 sans avoir été inculpés ».
« A Kpinkankandi, un homme a été arrêté à son domicile par des militaires dans la nuit du 24 mai 2022 et emmené en détention à Dapaong, où il se trouve toujours. Les militaires lui ont dit qu’une personne recherchée était entrée dans sa maison. Ils l’ont menotté et mis dans une cellule à la gendarmerie de Mandouri avant de le transférer à la gendarmerie du Borgou, où il est jusqu’à présent ».
Pour Amnesty International, les mesures d’urgence doivent être nécessaires, proportionnées au risque évalué et appliquées de manière légale et non discriminatoire, même en temps de crise. « Elles ne peuvent être légitimement utilisées pour justifier une répression de l’exercice des droits de l’homme, en particulier dans un contexte où les personnes sont susceptibles d’être intimidées ou menacées par des groupes armés », a déclaré Samira Daoud.
Aussi, ce mouvement mondial parle de droit à la liberté d’expression menacée au Togo évoquant des rassemblements de partis politiques d’opposition interdits sous prétexte de sécurité nationale, tandis que ceux du parti au pouvoir ont été autorisés.